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Camille Fallot Lefevre : "J'ai découvert une communauté de gens formidables"
15 Sep 2016
Camille, Épisode 2 - Happy Project s'associe avec Ticket For Change pour vous faire suivre de l'intérieur « Ticket for Action », le programme d'accompagnement des entrepreneurs sociaux de demain. Anne-Sophie Robineau, 29 ans, et Camille Fallot Lefevre, 37 ans, ont six mois pour passer à l'action. De l'idée au lancement de leurs projets, en passant par les tests et prises de tête, embarquez avec ces deux Parisiennes pour une aventure entrepreneuriale mais surtout très sociale. Avec à la clé, on l'espère, de quoi vous inspirer...
Au programme de ce deuxième épisode : Camille raconte son expérience sur le Tour de France de Ticket for Change. 10 jours de rencontres, d'apprentissage, de partage pour donner un coup de boost à son projet.
Alors, c'était comment le Tour ?
Camille : On a vécu dix jours fous. Pour une grande partie d'entre nous, prendre autant de temps loin de notre famille, ça arrive rarement. C'était déjà un moment privilégié par le temps qu'on s'accorde pour soi ! Le tempo était serré, surtout les 5 premiers jours. On a présenté nos projets à beaucoup de professionnels, parfois réceptifs sur nos sujets parfois moins (voire même super critiques), il a fallu mobiliser nos cerveaux à mille kilomètres par heure avec des rebonds pouvant arriver plusieurs fois par jour. C'était fatiguant émotionnellement et physiquement parlant. Et ça, ça ressert les liens ! J'ai découvert une communauté de gens formidables, il y a eu très vite une solidarité qui s'est mise en place entre les participants, et des liens d'amitié forts avec beaucoup d'honnêteté et de confiance. Le résultat à l'arrivée est là. En dix jours, le projet a grandi dans ma tête. J'ai l'impression d'avoir été poussée dans une fusée !
Comment a évolué ton projet pendant le tour ?
Il s'est clarifié. J'ai réussi à mettre des mots sur ma mission sociale. Jusque-là, elle totalement axée sur les réfugiés. Il a fallu que je la bascule du côté clients, de ceux qui payent pour le service : les entreprises. J'ai eu 3 jours difficiles au tout début du tour, en lien avec cela, avec mon histoire. Il a fallu que je reparte de ce qui est important pour moi et de pourquoi ça l'est. J'y suis arrivée, grâce à tous les coachs et particulièrement à Ucka Ludovic Ilolo. Maintenant j'ai une vision plus macro de mon sujet et je peux la projeter à 20 ans ! Je suis encore plus en accord avec ce que je fais, c'est très motivant. Je vise plus à l'essentiel, et je trouve que mes présentations sont plus compréhensibles.
Qu'as-tu appris sur toi-même ?
Pendant ces dix jours, on nous a appris la technique des quatre sphères. La première est celle qui se trouve au bout de tes pieds. C'est toi. La deuxième, c'est dix mètres autour du toi, tes voisins, tes amis ceux que tu vois immédiatement. La troisième, c'est cinquante mètres, donc un peu plus loin, les amis de tes amis par exemple. Et la quatrième c'est toute la ville. Cette technique permet de surfer en permanence entre les moments d'introspection où tu as besoin de te « fermer » pour te (re)trouver et les moments d'ouverture où tu vas chercher ton énergie chez les autres. Je suis profondément extravertie mais j'ai besoin aussi de moments seule avec moi même. Prendre du recul, se refermer, s'ouvrir. Tout est dans la flexibilité. Créer son projet, c'est faire cette gymnastique en permanence, et cela implique de bien se connaître.
Quelles réponses as-tu trouvé par rapport à ton projet ?
Comment le mettre en œuvre de manière réaliste, avec des petits pas. Quand on s'attaque aux sujets des migrations internationales forcées, on est face à un mur de mille mètres de haut, qui peut s'allonger chaque jour encore plus, selon les gens que tu rencontres et leur résistance face au changement. Certains jours ça booste, d'autres jours cela effraie et décourage. Je suis revenue du tour avec un « MVP », un plan de test de ma solution faisable et pas surréaliste, à mettre en œuvre juste avant le prototype. C'est un outil que je ne connaissais pas, très pragmatique, et que j'ai défini avec des professionnels du montage de social business pendant le tour. C'est clairement la clé qu'il me manquait à ce stade pour avancer. Pas à pas donc.
Sur quoi dois-tu travailler pendant les prochaines semaines ?
Quels sont les problèmes les plus urgents que les entreprises rencontrent en matière de recrutement ? et comment les règlent-ils à ce jour ? Quels sont leurs leviers à embaucher des réfugiés ? Et combien seraient-ils prêts à payer pour un service de coaching de transition comme celui que je propose ? Voilà les quatre questions qui vont me servir de leitmotiv pendant un mois. Je dois interviewer 30 entreprises dans des secteurs différents avec des contacts positionnés à un même niveau sur la chaîne des processus (c'est la méthode la plus efficace qu'on m'ait donnée). Dix minutes par interview, par téléphone si les interlocuteurs n'ont pas le temps. Ou sinon mieux, en physique !
3 mots pour résumer le tour ?
Résonnant - Dynamitant - JoyeusesEtTrèsBellesRencontres
Meilleur souvenir ?
À Lille, nous avons fait une étape chez Auchan, avec son fondateur Gérard Mulliez, 85 ans. Un homme inspirant, qui nous a transmis sa vision du monde, et des conseils à la pelle. C'était formidable de l'entendre parler ouvertement de ses échecs. Il a le discours de celui qui n'a plus rien à prouver, il parle cash. Ce sont surtout les projets en lien avec la distribution qui l'intéressaient mais à la fin, les questions étaient libres. Je lui ai demandé quels seraient les freins de ses équipes chargées du recrutement à embaucher des réfugiés. Il a répondu qu'il était difficile de recruter des réfugiés alors qu'il y avait des locaux qui ne trouvaient pas de jobs, et que c'était la peur probablement qui prédominaient l'embauche des réfugiés. La réponse était honnête ! Elle m'a rappelé que dans les grands groupes, c'était cette génération que j'allais devoir convaincre aussi, que la peur de l'autre c'était à tous les étages du bâtiment qu'il allait falloir la lever. Bizarrement, alors que certaines interventions m'ont bousculée, celle-là m'a fait du bien. Elle m'a boosté !
Meilleure rencontre ?
Samuel Grzybowski à Lille, lors d'une journée dans les locaux du groupe Adéo (qui comprend entre autres Leroy Merlin). Samuel est fondateur du mouvement Coexister, et de Convivencia, un cabinet de conseil spécialisé dans l'accompagnement des grandes entreprises sur les questions de laïcité et de diversité religieuse. En lui présentant mon projet, j'ai vu une flamme s'allumer dans ses yeux que je n'avais pas vu depuis plusieurs jours. Je voulais qu'il me parle de sa mission sociale et hop en trente minutes à peine, il m'a éclairé sur la mienne. Parfois un mini brainstorming, vous fait avancer à pas de géant. Avant de le voir, je sortais d'un RDV avec une responsable développement durable d'un énorme groupe français, qui m'avait dit en conclusion : « Votre projet est intéressant mais ça va être très dur ». Samuel a relancé l'ascenseur émotionnel mais dans l'autre sens !
Une leçon à retenir ?
Si tu te fais confiance et que tu crois en toi, ton projet va générer pleins d'ondes positives et les opportunités vont venir à toi. Si à un moment les portes s'ouvrent plus facilement, il n'y a pas de hasard. C'est que ça vient aussi de toi et de ton ouverture face à ton propre projet ! J'avais déjà lu ça cent fois en haussant les épaules. Et bah quand ça commence à marcher, tu fais moins la maligne !
Le projet d'un/e autre participant/e qui t'as le plus marqué ?
Pas un mais trois !
- Celui de Laetitia Lycke, qui vise à lutter contre l'isolement des femmes qui sont touchées par la perte d'un bébé de 3 mois de grossesse à 1 mois après à la naissance. Des projets comme celui de Laetitia et le mien sont confrontés à devoir lever des peurs. On s'attaque à des tabous.
- Celui de Marine de Poncins, qui vise à humaniser la place de la femme enceinte dans les entreprises.
- Celui de Florence Morgens, qui veut monter dans son entreprise (une grande mutuelle française), un programme d'épanouissement professionnel de deux jours au vert, pour tous les collaborateurs.
Entre nos quatre projets, il y a un lien. On touche aux politiques RH des entreprises, qui sont le cœur des réacteurs des grandes entreprises. Chaque projet apporte quelque chose de nouveau, et on se plait parfois toutes les quatre à imaginer que l'une d'elles pourrait même « acheter » nos quatre prestations à la fois ! Ce serait alors une petite révolution, non ?! Avis aux amateurs !
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Rendez-vous en octobre pour l'épisode 3 de Camille !