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Camille Fallot Lefevre : "Je vis une période de ma vie très stimulante, j'ai l'impression que tout est possible !"
31 Aug 2016
Camille, Épisode 1 - Happy Project s'associe avec Ticket For Change pour vous faire suivre de l'intérieur « Ticket for Action », le programme d'accompagnement des entrepreneurs sociaux de demain. Anne-Sophie Robineau, 29 ans, et Camille Fallot Lefevre, 37 ans, ont six mois pour passer à l'action. De l'idée au lancement de leurs projets, en passant par les tests et prises de tête, embarquez avec ces deux Parisiennes pour une aventure entrepreneuriale mais surtout très sociale. Avec à la clé, on l'espère, de quoi vous inspirer...
Au programme de cet épisode : on fait les présentations avec Camille, juste avant le départ du Tour de France de Ticket for Change. Soit 10 jours pour donner un coup de boost à son projet et avancer sur son business model, tout en étant épaulées par des coach, des mentors et autres experts dans le domaine.
Qui es-tu ?
Camille : J'ai entamé mon parcours à la Sorbonne où j'ai étudié 5 ans pour devenir juriste en droit européen. Puis je suis tombée dans la marmite de l'intelligence économique, et j'ai été consultante pendant 10 ans en RH et en Organisation, sur des projets de transformation dans des banques. En 2015, j'ai été arrêtée net dans mon ascension professionnelle par un burnout. Au même moment, mon mari s'est vu proposer un poste à Bruxelles, en Belgique. Je suis arrivée dans ce nouveau pays, sans aucune énergie. Après quelques mois une peu compliqués, j'ai décidé de relever un nouveau challenge et de mettre mes compétences au service de projets ayant un impact concret sur la vie quotidienne des gens. Je suis partie en immersion chez Médecins du Monde, où j'ai coordonné des projets d'urgence et de développement pour des migrants, des détenus en prison, et des sans-abris.
Quel est ton projet ?
Le problème que je souhaite résoudre est celui de l'intégration des réfugiés qui, à leur arrivée dans le pays d'accueil, rencontrent beaucoup de difficultés pour trouver un emploi. Alors qu'ils sont surmotivés pour travailler ! Mon projet vise à les aider à décrocher rapidement un job pour qu'ils retrouvent l'autonomie financière, et qu'ils débloquent les autres volets urgents liés à leur nouvelle vie (obtenir un logement, faciliter le regroupement avec le reste de leur famille restée bloquée dans un autre pays, etc.).
Comment est née l’idée de ton projet ?
L'été dernier, j'étais à Bruxelles au moment de l'arrivée de centaines de migrants. Un gigantesque camp s'est installé dans un petit parc au milieu d'un quartier d'affaires semblable à celui de La Défense, où j'ai travaillé pendant de longues années. Il y avait du bruit, des cris, du monde partout, des WC en ligne le long de la route, des femmes et leurs enfants qui ne voulaient pas sortir de leurs tentes parce qu'elles avaient peur des médecins. L'ambiance était électrique, les associations présentes étaient dépassées, tout le monde paniquait. La nuit suivante, j'ai envoyé mon CV dans plusieurs ONG. Deux heures plus tard, j'étais contactée pour structurer la stratégie de communication de crise chez Médecins du Monde. Dans mon métier de consultante, il me manquait le volet aide aux autres, avec l'expérience autour du camp, j'ai découvert tout un pan de la réalité de la vie que je ne connaissais pas, et que j'étais enfin prête à regarder.
À quelle phase de développement se situe ton projet ?
Je viens de passer 2 mois à réaliser mon arbre à problème, qui m'a été inspiré par le programme Ticket for Action. Pour connaître les raisons des difficultés rencontrées par les réfugiés pour trouver un emploi, je suis partie en immersion terrain et j'ai réalisé 25 interviews de mes parties prenantes : migrants, réfugiés, chefs d'entreprises. J'ai lu des ouvrages, des études. J'ai analysé les solutions déjà existantes, dans plusieurs pays d'Europe (Allemagne, Espagne, Pays-Bas, France, Belgique). Enfin, j'ai rencontré des psys spécialisés sur le volet santé mentale des migrants. L'objectif : comprendre comment les blessures narcissiques pouvaient impacter les attentes des réfugiés qualifiés en matière de recherche d'emploi. Bref. J'ai ratissé large !
Comment as-tu découvert l’entrepreneuriat social ?
Quand j'ai commencé à travailler dans une ONG, je me suis dit qu'il fallait que je « gomme » un peu mes études d'intello d'il y a 10 ans, avec une formation courte et axée terrain. J'ai pris 6 mois pour me consacrer au MOOC « Devenir Entrepreneur du Changement », co-créé par Ticket for Change et HEC Paris. Le programme a parfaitement fait le lien entre mes compétences d'intrapreneuse en entreprise, spécialiste de la conduite du changement, et mon envie de créer un projet axé sur une mission sociale.
Qu’est-ce qui te plait dans cette manière d’entreprendre ?
La liberté de disposer de mon temps comme je le souhaite ! J'ai beaucoup travaillé au contact de personnes qui vous disent qu'il faut penser à côté de la « petite boîte » mais qui ne le font... pas. Depuis que j'ai quitté le conseil, j'ai pris du temps et du recul pour m'inspirer : je me suis intéressée à l'innovation RH, aux entreprises libérées, j'ai lu plus de livres en 2 ans que ces 10 dernières années ! J'ai aussi pris le temps de rencontrer des gens différents de ceux que je fréquentais avant, et ça je peux le faire parce que j'ai plus de liberté dans mon timing. Je vis une période de ma vie très stimulante, j'ai l'impression que tout est possible !
Qu’est-ce qui t’a donné envie de participer au programme Ticket for Action ?
Le goût du challenge, clairement. À la fin du MOOC, j'ai rempli le dossier d'inscription (15 pages !), parce que je savais qu'il me fallait de l'aide pour faire passer mon projet du MOOC de la théorie à l'action. En réalité, je doutais encore trop de mon projet et Ticket m'a propulsée. En me sélectionnant, ils m'ont donné la confiance qu'il me manquait pour me lancer.
Sur quels points dois-tu particulièrement travailler pendant ce Tour ?
Sur le Tour, je dois avancer sur le prototype de la solution et le business model. Je pivote encore beaucoup, j'ai des éléments du projet qui changent chaque jour. C'est déstabilisant, et être accompagnée par des experts qui connaissent ces étapes, est crucial et rassurant. D'un point de vue personnel, je dois aller plus à l'essentiel et accepter de renoncer à certains volets de mon projet. Au moins au démarrage.
Qu’attends-tu du Tour ?
Du réseau, des idées, des remarques, de la reconnaissance, et du vécu, beaucoup beaucoup de vécu. Pour partager les méthodes qui marchent et les erreurs types, celles que font beaucoup d'entrepreneurs quand ils se lancent et qui emmènent sur de mauvaises pistes. Et pour découvrir de nouvelles méthodes et de nouveaux outils : design thinking, business canvas, ... Tant que tu n'as pas appliqué ces démarches, tu peux lire beaucoup d'articles théoriques dessus, mais tu n'as carrément aucune idée de ce dont il s'agit réellement !
Où te vois-tu dans six mois ?
Il faut que je trouve rapidement un moyen de récupérer un salaire, donc j'ai deux scénarios. Soit j'ai monté ma société de service, grâce à un partenaire qui finance mon projet et mon poste ; soit je suis redevenue salariée d'une organisation et je développe le projet en interne. Dans les deux cas, accélérer l'embauche des réfugiés dans nos entreprises, c'est l'un des leviers de demain pour faire évoluer les politiques RH en matière de diversité et injecter plus d'impact social dans une marque. C'est surtout une première étape pour accepter que notre monde est en changement, que c'est normal et qu'il va falloir apprendre à vivre avec !
Rendez-vous en septembre pour l'épisode 2 de Camille !